Luthiers en guitare

Faire résonner la profession

Le 09/05/2017
par Samira Hamiche
Grâce à leur créativité, les luthiers en guitare et cordes pincées ne redoutent pas la concurrence des grandes marques. Pourtant, la branche doit aujourd’hui rénover son modèle économique pour subsister. Réflexion avec Jacques Carbonneaux, membre fondateur de l’Association professionnelle des luthiers artisans en guitare et cordes pincées (APLG). 
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Jacques CarbonneauxJacques Carbonneaux est membre fondateur de l’APLG et de l’European Guitar Builders. Cette association est à l’origine du plus grand salon mondial dédié aux luthiers indépendants, le Holy Grail Guitar Show (Allemagne).

Fédérer les artisans luthiers : tel est le défi de Jacques Carbonneaux. En 2013, ce passionné de guitare participe à la création de l’APLG pour soutenir la fabrication d’instruments. Une initiative ardue : "Pas facile de rassembler dans une profession où l’individualisme est très présent".

L’association compte 80 membres. Elle représente les métiers de la guitare au sein de la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI) et porte leur voix auprès des institutions dont elle dépend : Institut national des métiers d'art (INMA), chambres de métiers, mais aussi ministères de la Culture, de l'Économie, et plus récemment de l’Environnement. En effet, depuis le 4 février, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) impose aux professionnels de la facture instrumentale une réglementation plus restrictive des bois tropicaux. Chaque instrument exporté hors UE devra être accompagné d’un certificat de réexportation et d’un permis d’importation (pour certains pays).

"Cette législation bouleverse toute la planète musicale", insiste Jacques Carbonneaux, qui milite pour libérer les luthiers de cette procédure jugée "inadaptée". "Nous respectons la nature et avons conscience de la déforestation, pose-t-il. Mais pour les luthiers qui exportent, c’est une complication supplémentaire et nous craignons qu’à terme, cela favorise le protectionnisme."

Un marché à réformer

Environ 400 artisans luthiers exercent en France. "Avec l’apparition du statut d’auto-entrepreneur, la profession a explosé." Toutefois, le marché tend à saturer et les jeunes luthiers réparent plus qu’ils ne fabriquent. 

La plupart des instruments en circulation sont des entrées de gamme, premier choix des guitaristes débutants. Or, "impossible" pour les artisans de se placer sur ce marché, dominé par des géants de l’industrie faisant sous-traiter à bas coût. "L’artisan n’a pas les moyens de production pour proposer des instruments d’étude. Dans une vie, il ne fabriquera que 300, 400 instruments !"

L’industrie, elle, accroît son offre du haut-gamme. "Elle prend des parts de marché sur l’artisanat en proposant du 'presque sur mesure', mais cela reste de la fabrication en série."
Musiciens aguerris, collectionneurs… Cette clientèle "de niche" n’hésite donc pas à mettre la main au portefeuille pour une guitare artisanale. 

En France, une initiative vient de briser la glace, réconciliant artisanat et production en série. La PME Algam s’est associée au luthier MOF Maurice Dupont pour créer la marque Lâg&Dupont : des guitares haut-de-gamme fabriquées à Thouaré (44), grâce au savoir-faire d’un professionnel. "On va enfin avoir une marque française avec le savoir-faire d’un vrai luthier !"

www.aplg.fr

Page Facebook de laguitare.com

Démocratiser la musique

L’APLG, à travers la CSFI, soutient l’association Orchestre à l’école, qui a permis à 32 130 enfants de pratiquer un instrument en 2016. "L’impact est très fort sur l’enfant : son rapport aux adultes se bonifie, se réjouit Jacques Carbonneaux. La pratique de la musique, c’est une hygiène de vie. L’art est un bon outil pour canaliser notre jeunesse. "

www.orchestre-ecole.com

 

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